Dans ce treizième tome de L'Europe et la Profondeur à partir d'analyses tant picturales (Cézanne Van Gogh Lascaux Vermeer Picasso) que poétiques (Rimbaud Hôlderlin Rilke) Pierre Le Coz ne tente rien de moins que de raconter l'histoire des rapports que depuis son origine l'espèce humaine entretient avec l'image. Et cela comme si la capacité de cette espèce à "fabriquer des images" constituait avant même peut-être le langage sa véritable essence : de signature donc non tant d'abord "poétique" que picturale. L'homme avant que d'être l'homo sapiens de notre moderne anthropologie serait-il cet homopictor: la créature qui pour avoir loisir de configurer le chaos phénoménal d'un "univers sans images" (Rimbaud) en un monde de/du sens doit faire passer cet univers au filtre de l'élaboration - par traitement préalable de celui-ci en "motifs" - de telles images ?Il faut donc lire ce Paradis des orages comme une sorte de plongée généalogico-pensive dans l'abîme du temps en direction de l'origine de notre propre espèce : comment l'homme est devenu "humain" par cette faculté qu'il a développée de tirer-"figure"-de/isoler-en-"motifs" les choses qui l'environnent. Faculté toutefois qui tout en ayant fait de lui ce "configurateur-de-monde" (Heidegger) trouve aujourd'hui sa sanction comme "hubristique" - en le mouvement de l'oubli de cette même essence picturale - dans cette inflation du procédé de l'image qui semble être comme la signature de notre époque. Ce pour quoi ce Paradis - de tonalité le plus souvent dans le cours de sa rédaction analytico-picturale - s'achève par un long examen du concept debordien de "Spectacle" avatar moderne- marchand de l'ancienne idolâtrie.Par quoi l'ouvrage après cette exploration de l'origine ontologico-iconique de l'humanité revient à des questions elles très actuelles et pour cette humanité-là: la nôtre tout ce qu'il y a de plus crucial : celles qu'avaient déjà abordées - quoique par des biais selon plus "philosophiques" ou plus "théologiques" voire très "politiques" - les tomes précédents du "grand récit" de Pierre Le Coz.