L’ouvrage de Gottlob Ernst Schulze qui paraît anonymement en 1792 aura fait comme l’indique Hegel « une entrée fracassante contre la philosophie kantienne ». Fichte qui en publiera peu après une célèbre recension réagit immédiatement : « Avez-vous lu Énésidème? Il m’a bouleversé un certain temps a démoli en moi Reinhold m’a rendu Kant suspect et a renversé tout mon système de fond en comble ».S’interrogeant en effet sur les conditions de possibilité de la philosophie en général et de la démarche critique en particulier incapable de rendre compte d’elle-même (d’où parle-t-elle?) l’Énésidème témoigne avec éclat de ce que l’arsenal sceptique après Kant a rapidement retrouvé son actualité et sa présence au cœur même du dispositif philosophique.Comme les contemporains l’auront bien vu (Fichte Jacobi Maïmon Hegel) répondre aux objections d’Énésidème ce sera du même coup fonder la possibilité de la philosophie elle-même et redonner à la philosophie de Kant l’unité et la systématicité qui lui faisait défaut et l’avaient donc rendue vulnérable aux attaques du sceptique. Une nouvelle tâche se dessine : « achever » la Critique en consolider les fondements et l’immuniser contre le scepticisme.