L’empirisme des Lumières en philosophie de la connaissance ne s’accomplit pas fatalement dans le scepticisme de Hume et ne renonce pas inévitablement à une conception forte de la nécessité dans le monde. Au milieu du XVIIIe siècle les meilleurs philosophes qui se réclament de Locke et de Newton interrogent le statut modal des lois de la nature et se demandent si elles pourraient s’avérer aussi nécessaires que les vérités mathématiques. Cette tentative passe par une critique de l’héritage leibniziano-wolffien à propos de la nécessité ex hypothesi des lois de la nature et du statut des mondes possibles et elle se joue autour des contributions de Maupertuis. C’est sous son inspiration que l’Académie de Berlin publie la question de savoir si les lois du mouvement sont de vérité nécessaire ou contingente et le présent ouvrage offre une première étude d’ensemble des archives inédites de ce concours. Ainsi s’éclairent les contributions majeures de d’Alembert et de Kant en même temps que se renouvelle notre compréhension de la philosophie seconde des Lumières. L’idée de nature jusqu’à la fin du XVIIIe siècle engage toujours une théorie de l’ordre et en fin de compte une prise de position sur la théologie physique – sur le rapport de l’intelligence souveraine à la contingence mais aussi à la nécessité des lois qui organisent les phénomènes.