Claudel a désiré et aimé le Japon et celui-ci le lui rend bien qui lui voue un véritable culte. Adolescent il partageait avec Camille la passion japoniste. Jeune diplomate il rêva en vain d'y être affecté et s'il put y faire un voyage d'agrément au départ de l'un de ses postes chinois (plusieurs poèmes de Connaissance de l'Est en témoignent) il lui fallut un détour de quelque trente années pour y être nommé dans la force de l'âge alors qu'il venait d'accéder au grade d'ambassadeur de France. Artisan d'un éphémère rapprochement politique entre le Japon et la France sortis l'un comme l'autre vainqueurs et isolés de la Première Guerre mondiale et partageant la situation de puissances coloniales aux marges du monde chinois Claudel va subir aux côtés des Japonais l'épreuve du séisme dévastateur de 1923 laissant de son odyssée un témoignage saisissant "À travers les villes en flammes". Il va aussi s'adonner à un travail en collaboration avec des artistes locaux de premier plan peintres musiciens hommes de théâtre qui conduira à ces oeuvres inclassables et métisses que sont le mimodrame La Femme et son Ombre et le recueil Cent phrases pour éventails. Fondateur d'institutions culturelles franco-japonaises pérennes adulé par les Japonais qui célèbrent en lui l'"ambassadeur-poète" Claudel parcourt inlassablement le pays dont la nature et la tradition esthétique illuminent les proses variées de L'Oiseau noir dans le soleil levant. L'oiseau noir c'est-à-dire lui-même du fait de la parenté phonétique qu'il décréta entre ces mots en japonais kurodori et la prononciation vernaculaire de son nom Kurôderu...