Autour de Trieste la ville légendaire jadis carrefour de langues et de cultures s'étend une zone de plateaux calcaires avec ses dolines ses eaux enfouies sa nature puissante et âpre comme son nom : le Karst. En italien ce nom hérissé s'adoucit comme sous une caresse légère : le Carso.Il mio Carso est le titre original de ce livre écrit par un jeune homme à l'aube du siècle. Il fait partie des oeuvres majeures de la littérature triestine - et l'on sait que d'Italo Svevo à Umberto Saba de Biagio Marin à Claudio Magris de Gianni Stuparich à Boris Pahor cette littérature se révèle d'une exceptionnelle fécondité. Mais l'accent de Slataper ne ressemble à aucun autre.Tumultueux vital débordant de sève voici le livre du temps perdu et retrouvé le chant du séjour extatique sur les lieux de l'enfance le journal d'une germination violente mais aussi en filigrane l'autobiographie d'une génération artistique et intellectuelle qui dans la guerre imminente voudra résoudre les tensions insolubles qui l'assaillent.Sous le double signe de l'ardeur sauvage de Pan et de l'action volontaire de Prométhée une jeunesse s'offre et se consume ici dans la chair des mots. Un "ombrageux lyrisme" émane de ce livre observait Claudio Magris. Et il ajoutait : "Le Karst symbole de l'aridité en même temps que de l'âpre fraîcheur de la vie cernée par la mort devient pour Slataper le symbole de la genèse de cette parole poétique qui crée la vie."