Des hommes infâmes hantent les crèches et les orphelinats pour capturer des innocents et les dresser au combat. "Beaucoup de jeux de nuit" prescrivait Rousseau dans son Émile pour l'éducation des enfants. Tonsure étuve tatouage : les enfants ne sont
plus que ces numéros estampillés sur leurs flancs qui se répètent sur la toile de jute des sacs où ils se pelotonnent entravés les yeux bandés suspendus à des crochets. Mais un de ces chiffres est maudit et les brigands se le refilent comme une poisse une faiblesse une attirance inavouable. "S'abandonner au jeu des garçons c'est comme un loup se coucher sur un lit de fleurs mourantes" : tel est le dicton qu'inventait au XVIIᵉ siècle le Japonais Saikaku. Au XVIIIᵉ siècle Sade écrit à sa femme dans une lettre de prison : "Vous m'avez fait former des fantômes qu'il faudra que je réalise." Au XIXᵉ siècle un manuel pour adolescents fixera comme règle : "Le jeu finit lorsque tous les animaux ont été pris par le diable et sont devenus ses chiens." Ces épigraphes balisent les aventures de ce roman qui a plus d'un personnage .dans son sac à métamorphoses : la Vierge un chasseur de têtes un montreur d'ours un impresario
des frères un maître et son disciple.